lundi 28 octobre 2013

Je pense à voix haute, donc j'écris

34°57.786S 55°16.183W
Piriápolis, Uruguay

Avis à la Population !
Avant d'attaquer le sujet du jour je voulais revenir, si vous le voulez bien, sur la question que nous avons abordée la semaine dernière. A savoir si j'allais un jour remettre les pieds en France. Je pense que j'y ai répondu à ma façon, et je suis assez content de moi lorsque je vois les nombreux (et argumentés !) commentaires que ce texte a suscité. Cependant, il m'est apparu dans la semaine que finalement je pouvais retourner la question à pas mal des plus proches d'entre vous. Et vous ? Quand est-ce que vous prenez des vacances et que vous venez me voir ? Hein ?
C'est vrai quoi, vous sautez à bord d'un avion à pas cher, et hop ! En quelques heures vous êtes de l'autre côté de l'Atlantique ! Je promets même de nettoyer La Boiteuse si vous me prévenez suffisamment à l'avance !

Ceci dit, au cas ou vous vous poseriez la question de votre destination, sachez que celle-ci ne devrait pas tarder à changer... Et là, je vois d'ici vos oreilles se dresser tel le setter moyen. Comment ? Gwendal se déciderait à enfin abandonner le port de Piriápolis ?
Et bien oui, bien obligé puisque mon visa arrive à expiration. Bien sûr, dans l'absolu rien ne m'empêcherait de renouveler celui-ci ad vitam eternam. L’Uruguay est un pays tellement accueillant que ce serait un jeu d'enfant que de squatter ici jusqu'à la fin de mes jours sans avoir de compte à rendre à personne. En plus, franchement, citez moi un pays aussi avancé en matière sociétale que l'Uruguay, vous aurez du mal. Dernière réforme en cours, le cannabis est sur le point de devenir légal (il était déjà toléré). Mieux, il va être déclaré monopole d'état, cultivé et mis en vente au prix de un dollar (0,75 euro) le gramme. Bon, je ne fume que du tabac mais s'il y en a parmi vous que cela intéresse... 

Du maté dans le biberon !
Bref, tout ça pour dire que l'Uruguay pourrait tout à fait ressembler au petit paradis que je recherche par delà les vastes océans. Oui mais voilà... En ce qui me concerne il y a un hic, et pas un petit. Traitez moi de frileux, mais je trouve qu'il caille un peu trop dans ce pays. En plus le Rio de la Plata est vraiment un bassin de navigation merdique, alors tout ça cumulé fait que je n'ai quand même pas très envie de m'installer par ici.

Donc on va partir, et si possible avant l'expiration de mon visa, c'est à dire avant le 5 novembre. Et c'est là que les choses se compliquent car autant il est important que je me fixe des limites de temps en temps histoire de me motiver, autant le navigateur doit prendre en compte autre chose que le calendrier, à savoir la météo. Et là mes enfants, autant dire qu'on n'est pas sorti du sable.
Si j'en crois les prévisions j'aurais bien une fenêtre qui pourrait, à la rigueur, se dessiner le weekend prochain. Sauf que, on en a déjà parlé, les prévisions météorologiques dans le Rio de Plata au delà de 48 heures, s’apparentent plus à des prédictions qu'à des prévisions. Et encore, des prédictions faites par un devin débutant à peine sorti de l'école des charlatans. Donc autant dire qu'à l'heure actuelle je suis dans le flou le plus complet.

Foutez-moi la paix, je pense !
Il va donc falloir que je prépare le bateau et que je me tienne prêt à sauter sur la première occasion qui me sera offerte. En théorie, j'ai besoin de trois jours de vent favorables pour rejoindre Rio Grande do Sul au Brésil. Et croyez moi si je vous dis que trois jours d'affilé avec un vent dans la même direction c'est quasiment impossible dans le coin ! Cela veut donc dire (je réfléchis en même temps que j'écris), que je vais devoir probablement louvoyer, voire même me faire secouer comme un prunier, être malade, me faire tremper, me peler les couilles... Bref, ça va être une vraie partie de plaisir.

Un asado en bonne compagnie
Cela dit, et j'en terminerais là dans ma réflexion, je ne suis pas stupide au point de m'imposer des épreuves que je sais d'avance être douloureuses, à la fois pour moi et pour mon bateau. Donc, si jamais je loupe cette opportunité de partir, il ne faut pas que j'en fasse un fromage non plus. Après tout, comme me le disait ma voisine de ponton, Axele : T'es libre de faire ce que tu veux !
Et elle a bien raison Axele. Si j'ai choisi cette vie, c'est bien pour être libre. Alors on ne va pas se mettre martel en tête, et prendre les choses comme elles viennent. Si ça passe, tant mieux, et si ça ne passe pas... Et bien ça passera la prochaine fois !

Bon allez. Fin de la présente diatribe. Je vous remercie de m'avoir donné l'opportunité de réfléchir à haute voix devant vous, et je vais commencer à préparer mon bateau pour la navigation. Et puis tiens, je vais quand même passer voir l'immigration pour me renseigner sur les formalités de renouvellement de visa. On ne sait jamais !

PS : N'empêche, c'est vachement cool de vous avoir. Il suffit que je vous écrive quelques mots pour que les choses s’éclaircissent dans ma tête. Merci à vous les lecteurs !

Et Touline va bien !

lundi 21 octobre 2013

Pauvre France...

34°57.786S 55°16.183W
Piriápolis, Uruguay

S'il est une question qui revient régulièrement, aussi bien de la part de mes proches que de correspondants plus ou moins anonymes, c'est bien celle-ci. Quand est-ce que tu rentres ? Ou bien, dans un registre moins définitif, la question devient : Quand est-ce que tu viens faire un tour en France pour nous voir ?
En règle générale, je botte en touche et je réponds que cela n'est pas au programme pour l'instant. Une façon pour moi d'éluder la question en même temps que la réponse. Ou du moins de biaiser, le temps de chercher mes mots.

Le Bonheur ressemble à ça...
Sachez-le, dès même avant mon départ, alors que j'en étais à préparer dans ma tête un tour du monde à la voile en solitaire, j'avais déjà l'intuition que ce voyage ne devait pas s'envisager comme une parenthèse. Il s'agissait d'un choix de vie, et non pas d'une virée en mer limitée dans le temps. Je sentais au fond de moi que terminer ce voyage aurait quelque part le parfum de l'échec. Parce que c'est vrai quoi, vous faites le tour de la planète sur un voilier et après ? Vous croyez vraiment qu'il est possible de reprendre son train-train quotidien après un voyage pareil ? Et puis le côté : Youpi, je reviens d'un tour du monde à la voile en solitaire, regardez-moi comme je suis balaise ! Faites-moi une place dans votre monde ! Je suis peut-être un rêveur, mais je ne suis pas stupide. Je sais bien que les choses ne se passent pas comme ça. Et puis, je ne suis pas vraiment homme à me glorifier d'une performance, je pense que vous commencez à le comprendre.
Il est donc clair qu'à l'époque, et sans trop savoir encore mettre des mots dessus, j'envisageais déjà qu'un retour signifierait qu'au cours de ce périple, je serais passé à côté de quelque chose. Cela aurait voulu dire que je n'aurais pas trouvé le Bonheur avec un grand B.

Deux ans et demi plus tard, et si l'on excepte un aller-retour vite fait de quatre jours pour vendre ma maison, je n'ai toujours pas remis les pieds en France. Et franchement je n'en n'ai pas envie. Pas encore. Entendons-nous bien, j'aurais les moyens de me payer un aller retour si je le voulais, ce n'est donc pas un problème d'argent. De même, je sais très bien que si je venais passer quelques jours au pays, certaines personnes seraient ravies de m’accueillir, ce n'est donc pas non plus un problème de logistique. Non, mon souci est que pour envisager de faire une pause il faudrait déjà que j'ai le sentiment d'avoir accompli quelque chose... Et ce n'est pour l'instant pas le cas.
D'accord, vous allez me dire que je suis bien trop exigeant avec moi-même, que traverser l'Atlantique en solitaire c'est déjà pas mal, qu'avoir séjourné dans tant de pays c'est déjà quelque chose... Peut-être. Mais il n'empêche que cela ne me suffit pas. Pour ne serait-ce qu'un jour envisager de revenir il me faudrait... En fait, je n'en sais rien. Je vous le dirais lorsque je l'aurais fait !

Tu t'en fous toi, tu as un passeport espagnol !
Et puis... Et puis je dois vous avouer que ce qui se passe en France en ce moment ne joue pas vraiment en faveur d'un séjour au pays, fut-il bref. Depuis deux ans et demi que je suis parti, la France, ma France a bien changée. Sans doute ne vous en rendez-vous pas compte parce que vous avez le nez dedans, mais vu de l’extérieur je peux vous dire que c'est assez impressionnant.
Le racisme et la xénophobie se déchaînent depuis des mois et personne ne moufte. France Inter, ma radio, s'est transformé en affidé des banques et des assurances, et fait la part belle à des personnages (comme Finkielkraut la semaine dernière ou Copé encore ce matin) qui tiennent des discours odieux. Des discours qui, il n'y a pas si longtemps, auraient voué leur auteurs à la vindicte populaire et médiatique. Mais non, là encore personne ne moufte. Pire, on commence à trouver ça normal.
La gauche, elle aussi dite « normale », se droitise. La droite s'extrême-droitise. L'extrême droite jubile et engrange les points. Le pays dérape et tombe sur le cul, culbute et roule en arrière. Il régresse. On porte aux nues un type qui en descend un autre dans la rue d'une balle dans le dos. Cinquante années d'avancée sociétales sont mises en coupe réglée par un gouvernement sensément de gauche... Le code du travail est démoli. Les pauvres se mettent à payer plus d'impôts alors que les entreprises du CAC 40 se gavent comme jamais. On arrête une adolescente en pleine sortie scolaire pour l'expulser... Non mais sérieusement, c'est quoi ce bordel ? Elle est où la France des lumières ? La France du respect et des droits de l'homme ? On se croirait presque revenu dans les années quarante ! Ça sent la délation et la haine de l'autre. Ça sent la peur et la colère. Non, correction. Ça ne sent pas, ça pue. Et je peux vous dire que l'odeur on la sent à des milliers de kilomètres.

Ma dernière vision de la France, le port de Sète
Jusqu'à présent je me disais que si je devais un jour me planter dans ma quête, si je devais échouer, j'aurais toujours la possibilité et le plaisir de rentrer au pays. Que celui-ci m'accueillerait comme une mère son enfant... Là, je vous avouerais que je ne suis plus sûr de rien. J'ai peur de devenir comme ces voyageurs que je croise parfois, et qui tournent autour du monde non pas parce qu'ils le veulent mais parce qu'ils n'ont pas envie de rentrer chez eux.

Alors, alors... Alors quelque part cela me motive pour poursuivre ma route à la recherche d'un endroit où je pourrais dire que c'est chez moi. Cela me motive, mais cela me désole aussi. Car il y une différence entre partir parce qu'on ne se sent PAS chez soi, et partir parce qu'on ne se sent PLUS chez soi. Une énorme différence.

mercredi 16 octobre 2013

Ô mon bateau...

34°57.786S 55°16.183W
Piriápolis, Uruguay

Lorsque deux marins voyageur se croisent, ils se parlent. C'est comme ça, c'est obligé. Ils s'échangent des informations sur la zone de navigation ou sur la météo. Ils papotent sur les qualités respectives de telles ou telles marina, ou de tel ou tel mouillage. Ils se refilent l'adresse de la quincaillerie qui va bien, du boulanger qui fait du pain « à peu près comme chez nous ». Il dégoisent sur les tracasseries administratives du coin, ils commentent le prix des choses... Bref, ils communiquent.
Et puis au bout d'un moment, et surtout s'il s'agit de deux homme, ils en viennent à parler de leur bateau. Et c'est là que les choses peuvent devenir rigolotes, car invariablement chacun va défendre son bout de gras, vanter les qualités intrinsèques de sa monture, de ses aménagements, quitte à friser la caricature de l'ado qui cherche à prouver qu'il en a une bien plus grosse que son voisin.

Personnellement, je ne déroge pas à la règle. Mais même si mon approche de la vantardise est plus subtile puisque je commence toujours pas critiquer ma Boiteuse en énumérant la liste interminable de ses défauts... je finis toujours par vanter ses qualités qui sont essentiellement sa solidité et son immense mansuétude à mon égard.
Mais il arrive malheureusement un moment dans la conversation ou je décroche parce que je me révèle complètement incompétent, c'est lorsque l'on aborde le thème de l'architecture navale.

Entendons-nous bien, je crois pouvoir dire que je sais manœuvrer mon bateau (les quelques 8000 milles que j'ai déjà parcouru le prouvent), je sais également faire la différence entre un sloop, un ketch, un cotre et une goélette... Mais ça s'arrête là. Dès que l'on commence à causer de plan machin-chose, de dérive truc-bidule, de telle carène ou de tel type de gréement, je suis complètement largué !
Je suis complètement inculte en ce qui concerne les bases même du nautisme et les marques de bateaux que je saurais à coup sûr reconnaître au premier coup d’œil doivent se compter sur les doigts d'une main (Bon ok, une main et demie). Les arcanes technologiques des MOD 70, ou des 60 pieds IMOCA sur lesquelles tant d’aficionados s'extasient me laissent dubitatif, voire même m’indiffèrent. Bref, pour moi, du haut de mon inculture, un bateau ce n'est pas ça.
Un bateau c'est beau, ou pas. Un bateau ça donne envie de partir, ou pas. Pour moi un beau bateau il a forcément des panneaux solaires et une éolienne qui tourne. Pour moi un beau bateau c'est fait pour naviguer loin ou alors ce n'est un jouet pour faire la course entre gamins privilégiés. Point barre.
Je sais bien qu'encore une fois on va me reprocher d'être par trop radical. Mais que voulez-vous, je suis comme ça...

Bon, le but originel de cet article n'était pas de déblatérer sur mes opinions tranchés, mais plutôt de soumettre à la sagacité de quelques-uns quelques bateaux que j'ai pu croiser ici ou là et qui m'ont interpellés. Certains sont pour moi des énigmes, d'autres des coups de cœur, mais ils ont tous en commun d'être unique.
Alors chers lecteurs, je vous en prie, amusez-vous et n'hésitez pas à vous lâcher dans les commentaires. Aujourd'hui c'est forum spécial bateaux-qui-font-causer ! 


Le plus beau pour moi, le Skoiern
Une goélette avec seulement deux voiles d'avant, bômées.

Un ketch avec des wishbones !

Là... J'ai rien compris.

Le Tigara
Fernande, ma voisine.
Une jolie jonque

Le Mollymawk
Le Rêve d'Antille, Loïck
Oui, c'est bien un cata-jonque avec un mât sur chaque flotteur

lundi 7 octobre 2013

La bouse de dernière minute

34°57.786S 55°16.183W
Piriápolis, Uruguay

Je sais que vous vous attendiez à quelque chose de plus consistant, du moins certains d'entre vous, mais aujourd'hui je n'ai hélas que quelques photos commentées à vous proposer.
Ce n'est pourtant pas faute d'avoir bûché toute la semaine sur un texte qui au départ me semblait intéressant... Mais devant mon incapacité à formuler correctement ma pensée je viens de tout balancer à la poubelle. Mais ! Mais comme je me suis plus ou moins imposé de vous satisfaire au moins une fois par semaine, je me rabats donc sur ce que Beigbeder appelle dans son roman 99 Francs, la bouse de dernière minute.

Et la bouse en l’occurrence consiste à piocher dans les quelques photos que j'ai prises cette semaine et d'y ajouter quelques remarques.


Tout d'abord commençons par la Touline. Comme vous pouvez le voir elle a repris du poids et recommence ses promenades sur le quai pour la plus grande joie des promeneurs et des adolescentes pré-pubères qui passent leur temps à la prendre en photo avec leur téléphone portable. Notez que malgré son opération, Touline garde cette espèce de classe naturelle qui sied au grandes divas... Je vous avouerais même que son nouveau look lui donne du chien !

Ensuite je voulais vous présenter l'alpha et l'oméga de la flotte uruguayenne.


L'alpha, c'est probablement cette barque de pêche... Une de ces barcasses instables comme on en trouve par ici, et qui sont faite pour naviguer sur une mer sans vague. La semaine dernière l'une d'elle s'est retournée sur ses deux pêcheurs et seul l'un d'entre eux à été retrouvé vivant.


Et l'oméga ce dragueur de mines, Audaz, de l'Armada Nacional. Car oui, même si l'Uruguay est un pays profondément pacifique il entretient quand même une marine forte de vingt-cinq navires, plus une dizaine d'hélicos. Pas sûr que ça face le poids au regard des grands voisins que sont l'Argentine et le Brésil, mais bon...

Et pour finir je voulais vous montrer une brochette d'otaries. Voilà, de gauche à droite vous avez Esmeralda, Pepo, et Iniacio. Je vous laisse deviner qui aime qui dans cette histoire !



Voilà c'est finit ! Bon ok, je vous remets une petite dernière d'Esmeralda parce qu'elle est jolie.


Fin de la bouse de dernière minute !