jeudi 29 septembre 2011

Ça s’en va et ça revient…

30°25.322N 09°37.025W
Agadir

Le propre de la communauté qui est à présent la mienne, celle des nomades de la mer, c’est qu’elle n’est pas faite de liens durables. Les bateaux vont et viennent au grès de leurs plans de navigation, des saisons, des humeurs de chacun… Des affinités se créent pour un temps, puis chacun repart de son côté. L’avantage d’une telle façon de vivre, c’est que rien ne vous oblige à supporter un voisin que vous n’appréciez pas. Vous êtes amarré à côté d’un con, et bien ce n’est pas grave car cela ne durera que le temps que vous voudrez bien que ça dure.
A contrario, et c’est ce qui arrive la plupart du temps, vous pouvez rencontrer des gens super sympas, de belles personnes, mais cela ne dure pas…

Le San Miguel
Je vous avoue que pour l’instant j’ai un peu de mal à gérer cet aspect des choses. Cela me fait formidablement chier lorsque des personnes que j’aime bien s’en vont. Mais je me console en sachant que le hasard fera peut-être que nous nous recroiserons un jour…

Pourquoi je vous raconte ça ? Et bien parce que depuis les dernières nouvelles, le San Miguel, le Java, Abracadabra et le Losadama ont mis les voiles pour les Canaries et du coup le ponton s’est vidé de la plupart de ses enfants. Bon d’accord, il reste Alouette avec la petite Valentine, et d’autres sont arrivés entre temps, notamment le Blue Moon, mais ce n’est plus la même chose… C’est ça qui m’embête, l’indurabilité des choses. Mais bon, c’est un problème récurent chez moi, et je fais tout pour me soigner, je vous le jure !
Heureusement que certains d’entre eux ont des blogs, cela me permettra de suivre les aventures des uns et des autres.

Abracadabra
Ma grande joie a été de revoir mon ami Taka qui lui est revenu de Las Palmas où il était allé chercher son épouse… Ils sont arrivés de nuit, et lorsqu’au matin j’ai aperçu la silhouette de mon japonais préféré, j’ai été transporté de joie. Yes Taka is back ! J’ai été invité pour dîner, et nous avons repris nos discussions philosophiques au point où nous les avions laissées avant son départ.

Sinon, que vous dire ? Hier (c’était bien hier ?) je suis allé sous la coque de la Boiteuse pour gratter un peu les algues et les coques qui commençaient à prendre un peu leurs aises. Rien de vraiment grave pour l’instant, mais si je ne fais pas ça régulièrement je perdrais facilement un nœud de vitesse lorsque je reprendrais la route… Le souci c’est qu’après une demi-heure dans l’eau du port, la peau me brulait comme si elle était attaquée à l’acide ! Ca me piquait de partout ! Une horreur !
Je me suis lavé soigneusement sur le ponton et le lendemain tout allait bien, mais je crois que j’attendrais d’être aux Canaries pour réitérer l’expérience !

Le Java
Ah oui, j’allais oublier. Pour celles et ceux que la politique marocaine intéresse j’ai découvert une revue assez intéressante. Il s’agit d’un mensuel qui s’appelle Tel Quel, et qui dispose d’un site internet. L’on peut y lire des critiques assez pointues sur le régime en place… Comme quoi, il existe une certaine liberté de la presse ici au Maroc, du moment qu’elle évite soigneusement de s’en prendre directement au Roi. C'est déjà ça me direz-vous !

Voilà les zamis, comme vous l’avez certainement compris je n’ai pas trop la fibre littéraire en ce moment. J’ai conscience que ce texte manque un peu de punch, mais bon… Je ne peux pas être au top tout le temps, hein ?
L’avantage c’est qu’avec les liens que je vous ai mis, vous allez avoir d‘autres lectures pour vous distraire !
Le Losadama

samedi 24 septembre 2011

La cour de récré

30°25.322N 09°37.025W
Agadir
Des nouveaux !
Ma vie sociale s’est sérieusement étoffée depuis quelques jours. Une flopée de bateaux sont arrivés à la marina les uns après les autres, et ils avaient tous comme particularité d’avoir des enfants à bord… Résultat le ponton, mon ponton, s’est transformé en une joyeuse cour de récré.
Et devinez qui a été ravi de s’autodésigner pour occuper tout ce petit monde ? Ma pomme bien sûr !

Je me languissais depuis mon départ de rencontrer des bateaux-voyageurs avec des enfants… Car en fait, après avoir réfléchis au problème, les enfants sont ma seule compétence. Je m’explique.

Lorsque j’étais à Gran Tarajal j’ai eu un jour une discussion avec un voisin de ponton sur ce qu’il était utile de connaitre pour arriver à se faire un peu d’argent… Par exemple un type qui sait coudre les voiles et qui dispose d’une machine à coudre est sûr de trouver de quoi s’occuper quelque soit l’endroit où il se trouve. De même quelqu’un qui a des connaissances poussées en mécanique, ou bien qui dispose d’un matériel de plongée, est sûr de pouvoir un jour négocier ses compétences.
Le souci voyez-vous, c’est que moi je ne sais absolument rien faire de tout ça. A la rigueur je suis capable de bricolage simple, d’entretien, mais je ne dispose pas des compétences requises pour pouvoir me déclarer voiliers, mécanicien ou plongeur.

La seule compétence dont je puis m’honorer, et j’ai pas mal réfléchis avant de pouvoir l’affirmer, et bien ce sont les enfants. En effet, j’ai tout de même pratiqué l’animation pendant dix ans et ce dans tous les types de structures qui puissent exister : Colonies de vacance, centre aérés, classes vertes, villages de vacances type VVF, et bien sûr la plus belle expérience qui soit, prof.

Observons une crevette...
Ok, je dis prof mais je ne sais pas si c’est le titre qui convient. En fait j’ai été moniteur dans une MFR (Maison Familiale et Rurale), c’est-à-dire que j’enseignais des matières comme les mathématiques, la biologie, l’écologie, à des classes de CAP et BEP agricole… Ce qui à mon sens revient au même qu’être un enseignant du secondaire sans en avoir le titre et les avantages.

Bref, les mômes. C’est mon truc. Je n’ai jamais très bien compris pourquoi ni comment, mais dès qu’un gamin me voit, il est attiré par moi. Est-ce que c’est parce que j’ai une trogne rigolote, ou alors parce que je suis plutôt rond comme type, mais le fait est que du bébé à la fillette de 10-12 ans je les attire comme des aimants.
Bon, l’âge aidant je reconnais que je ne suis plus aussi patient que dans mon jeune temps, mais je sais qu’au fond de moi je dispose d’un talent naturel pour apprivoiser ces bêtes-là ! Certaines personnes l’ont, d’autres pas… C’est injuste, mais c’est comme ça, c’est un don.

Aussi, je m’étais dit que si j’avais un jour un service à proposer pour pouvoir en retirer quelques sous, ce serait celui-ci. M’occuper des mômes. Animation, soutien scolaire, tout ça, je sais faire. Et en plus j’aime ça, ce qui, vous en conviendrez, tombe plutôt bien.

Un mètre de long tout de même...

Donc tout ça pour dire que depuis trois jours, je m’amuse comme un petit fou ! J’ai ressorti ma nasse pour attraper des petits poissons que cette joyeuse bande observe avec une curiosité dévorante avant de les relâcher. On discute de ce qu’ils ont vu durant leur voyage… Les poissons, les dauphins, toutes ces choses qui peuvent paraitre merveilleuses à celui qui reste à terre mais qui sont leur quotidien…

Car mine de rien, il faut reconnaitre qu’ils sont un peu hors-normes ces mômes. Que n’aurais-je donné pour avoir la chance qu’ils ont… Sans compter que je suis persuadé qu’une jeunesse itinérante par delà le vaste monde ne peut que contribuer à faire d’eux de véritables êtres humains. Au sens le plus noble du terme.

PS : Sans autorisations parentales vous comprendrez que cet article ne soit pas illustré avec des photos de ces enfants…

mardi 20 septembre 2011

La vie est belle

30°25.322N 09°37.025W
Agadir

Nous sommes quel jour aujourd’hui ? Le 19 ? Le 20 septembre ? Déjà !
Voilà donc presque un mois que je suis arrivé à Agadir, et dix jours que je ne vous ai pas donné de nouvelles…
Ça commence à faire beaucoup vous ne trouvez pas ? Si quand même… Surtout en ce qui concerne l’alimentation de ce blog, je vous ai habitué à un peu plus de régularité.

Mais bon, que voulez-vous, il se passe parfois des moments où l’on n’a pas grand-chose à dire. Ou bien des moments où l’on attend d’avoir quelque chose à dire… Et dans les deux cas, plutôt que de raconter des trucs sans intérêts, je préfère encore me taire.

 Il vous en souvient sûrement, si je suis revenu sur mes pas, car on peut dire que c’est un peu le cas, ce n’est pas tout à fait pour faire du tourisme.
D’ailleurs en fait de tourisme, j’avoue que je ne mets que rarement le pied en dehors de la marina… Agadir est décidemment une ville trop grande pour moi. Me taper à chaque fois le taxi pour me rendre quelque-part me gonfle prodigieusement, sans parler du fait que j’en ai plus que marre de devoir en permanence faire attention à ne pas me faire voler. Cette vigilance de tous les instants est épuisante, je vous l’assure. En tous cas, moi ça m’épuise.
Aussi, je ne fais maintenant mes courses qu’une fois par semaine dans un endroit que je connais et où les prix sont clairement affichés. C’est un peu plus cher que dans le souk, mais au moins en une heure c’est réglé. Le reste du temps je me contente de rester tranquillement à la maison. Enfin, au bateau je veux dire. De toute façon c’est la même chose puisque maintenant, mon bateau c’est ma maison.

Vieille coque hollandaise
Puisqu’on parle de maison, je vous annonce que celle-ci est vendue. Enfin… quasiment, car ces choses-là ne se font pas sur un claquement de doigts et il faut encore nous fassions face à toute la paperasserie que cela engendre. Mais on peut dire que virtuellement, c’est fait.
Je peux donc recommencer à me projeter dans l’avenir et ça, c’est une bonne chose car depuis un moment j’avais l’impression de végéter. Au sens littéral du terme. J’avais le cerveau comme englué dans une espèce de mélasse. Les synapses déconnectés et le neurone flagada.

Mais maintenant ça va mieux, et je vais pouvoir me concentrer sur la liste des choses à faire pour la Boiteuse.
Comme ça, à première vue et compte tenu de mon expérience, je vais avoir besoin de :

Un nouvel ensemble GPS-sondeur-loch.
Deux panneaux solaires de 75 W, avec régulateur.
Un transformateur 12-220 V.
Une étaie largable.
Un foc de rechange et un tourmentin.
Un régulateur d’allure.

Splendide !
Ça, c’est pour ce qu’on pourrait appeler l’indispensable. Pour le superflu mais néanmoins utile il me faudrait ajouter.

Des nattes en jonc de mer pour remplacer la moquette à l’intérieur.
Une pompe de cale électrique.
Une nouvelle girouette.
Une femme.

(Pour les esprits chagrins qui auraient tendance à vouloir confondre les deux derniers items de ma liste, je précise que personnellement je fais très bien la différence entre les deux.)

Sinon quoi de neuf sur le ponton ?
Takao et Franck (Allez voir son blog !) ont levé l’ancre à destination des Canaries, ce qui fait que je me sens un peu seul les soirs puisque je ne peux plus profiter de l’immense culture de l’un et de la complicité de l’autre… mais bon, on fait avec. Un gros catamaran, un de ces camping-car flottant, vient d’arriver avec à son bord un couple et une fillette. C’est le deuxième enfant que je vois ici…. Mais je n’ai pour l’instant pas encore pu lier connaissance. C’est dur de se faire des copains pour jouer !

Franck à bord de son REV-VOLITION
De bien beaux voiliers sont venus et repartis. Je dis beaux, mais c’est selon mes critères à moi. C’est-à-dire que se sont de vieilles coques acier complètement ringardes mais qui ont à mes yeux le charme suranné de la grande époque des Knox-Johnston et des Moitessier…
L’immense majorité de ces bateaux bat pavillon français, mais j’ai pu croiser deux américains, quelques anglais, des hollandais, des allemands… Bref, ce petit monde bouge et se renouvèle, et moi j’assiste à tout ça.

Le matin lorsque je m’assois dans le cockpit pour prendre mon café, je regarde le héron qui chaque jour vient se poser sur le ponton d’en face… Lui aussi goutte ces instants privilégiés quand la ville dors encore et que le soleil commence à peine à réchauffer l’atmosphère. Je le regarde. Il me regarde. On se souhaite une bonne journée et chacun va vaquer à ses occupations.
Je ne sais pas si l’on peut comparer ma vie à celle d’un héron, mais je trouve que la sienne est plutôt cool… En tous cas lorsque je vois sa façon de marcher, je me dis que cela doit être cool de parcourir la vie ainsi, la tête haute, le pas sûr et distingué.


La grâce incarnée

Tien, je vais faire comme les hérons maintenant… D’autant que j’ai de quoi être fier de moi puisqu’aujourd’hui nous sommes le 20 septembre et que c’est en quelque sorte mon anniversaire.
Il y a cinq ans, j’arrêtais de m’empoisonner le corps et l’esprit à grand renfort d’alcool et je décidais de renaitre après avoir été mort pendant des décennies…

Donc aujourd’hui j’ai cinq ans. Et la vie est forcément belle quand on a cinq ans !

samedi 10 septembre 2011

Ascension

30°25.322N 09°37.025W
Agadir

J’ai une question qui me trotte dans la tête… Est-ce que c’est l’événement qui crée la narration, ou bien peut-on par souci de narration créer l’événement ? Les deux sans doute.
Non, si je vous demande ça c’est parce que l’événement dont il est question aujourd’hui n’a rien de formidable ni d’exceptionnel (quoique…). Enfin je veux dire qu’il se passe des choses de par le monde qui mériteraient cent fois qu’on s’y attarde, mais comme j’avais une grande envie d’écrire et qu’en plus j’ai des photos, je me disais que je pouvais vous pondre une tartine, comme ça au débotté, sur l’ascension de mon mât. Même si pour le coup, et je vous l’ai déjà dit, l’entreprise n’a rien de vraiment exceptionnelle.

Alors donc, chers amis, je suis pour la première fois de ma vie grimpé en haut d’un mât. Et pas n’importe lequel je vous prie, celui de la Boiteuse. Oui, cela peut vous paraitre bizarre, mais depuis plus de dix ans que je pratique la voile, je me suis toujours débrouillé pour échapper à cette corvée. Bon d’accord, mon poids (celui d’avant hein ? Parce que maintenant je suis tout mince tout beau !) y était pour beaucoup, mais le fait est que sur les bordées on arrivait toujours à trouver un volontaire plus léger que moi… Donc naturellement ma place était surtout celle de celui qui assure le grimpeur, plutôt que le grimpeur lui-même. Simple logique d’efficacité.

Bon, je vous le dis tout de suite, j’ai fais ça plus par besoin que par envie. L’idée m’en est venue en filant un coup de main à mon copain Franck. Quelques jours avant il m’avait demandé de l’assurer dans le même exercice, ce que j’avais fait bien volontiers. Puis, je me suis dit que ce serait peut-être bien que je fasse pareil car depuis que j’avais acheté la Boiteuse, je n’étais jamais monté vérifier si tout allait bien à dix mètres de haut. En plus j’ai le feu de mouillage qui ne marche plus, donc c’était l’occasion pour moi de remédier à ça.

Au passage, admirez la carrure de l'athlète...
Pardon ? Pourquoi je ne suis jamais monté en haut de mon mât ? Et bien parce que je n’ai pas le matériel pour le faire c’te blague ! Sinon, vous pensez bien que j’aurais déjà tenté l’expérience…

Bref, j’ai donc demandé à Franck de me prêter son matos et de m’assister pendant que j’ascensionnais le bordel. Oui parfaitement, le verbe ascensionner existe, en tous cas depuis que je l’ai inventé.

Je vous passerais les détails techniques, mais sachez qu’alors que je grimpais péniblement le long de ce mât, je n’en menais pas large. Oh, on ne peut pas dire que j’avais la trouille, mais j’avais comme une boule à l’estomac qui m’a rappelé mes jeunes années lorsque pour les beaux yeux d’une monitrice je m’étais initié à la varappe. Je n’ai jamais été doué pour des raisons purement physiologiques. Mon centre de gravité est beaucoup trop bas et les bras et mes jambes sont bien trop courtes… En plus je souffre d’un vertige complètement crétin puisque j’ai les sens qui se brouillent lorsque je regarde en l’air et pas en bas !

J'y suis !
Toujours est-il que malgré tous ces handicapes je suis quand même arrivé à la première barre de flèche (c’est le machin horizontal au milieu de mât). Là, je me suis rendu compte qu’il manquait un écrou au boulon qui retenait la barre tribord. Franck me fait passer les outils nécessaires dans un petit seau souple et je remédie à ce petit inconvénient qui, s’il avait perduré, aurait pu être pas mal embêtant pour la Boiteuse.
Ceci fait j’attaque la seconde partie du mât. Ho-hisse, ho-hisse !
Sur le quai, quelques badauds se sont arrêtés pour admirer le spectacle. Ouais, tu parles ! Ils n’attendaient qu’une chose, que je me casse la gueule ces vautours !

Mais non, j’ai tenu bon. D’autant plus qu’au fur et à mesure de mon ascension mes gestes se sont fait plus précis, et mes efforts moins désordonnés. J’arrive enfin au bout de ma drisse, et là, con de moi, je me rends compte qu’il me manque quelques dizaines de centimètre pour atteindre le feu de mouillage situé tout au sommet ! Grrr !!!
Impossible de faire quoi que ce soit. Pour arriver à bosser dans la position adéquate il me faudrait me suspendre à un point situé carrément au niveau du feu, et même un poil plus haut, et rien n’est apparemment prévu pour ça.
Je cherche une solution pendant cinq minutes, mais peine perdue. Je suis coincé et il me faut bien me résoudre à redescendre sans avoir réparé ce fichu feu.

Des échelles, il n'y a rien de mieux.
Franck me fait donc descendre, et une fois en bas nous faisons un rapide bilan de l’exercice.
La bonne chose, c’est que j’ai anticipé une future catastrophe en reboulonnant cette barre de flèche. L’autre bonne chose, c’est que je sais maintenant ce que ça fait de grimper là-haut… C’est flippant, mais rien de vraiment insurmontable. En tous cas au port, car si on imagine faire la même chose en pleine mer par bonne brise, les choses peuvent devenir carrément scabreuses.
Si vous saviez comme j’envie ces bateaux qui ont la bonne idée d’avoir des échelles incorporées au mât. Si j’avais à choisir un autre bateau, ce serait là un critère indispensable. Mais bon, à moins qu’un jour l’occasion me soit donnée de tomber le mât, et que j’en installe une… Je vais devoir faire sans.

Sur ma liste de choses à acheter pour la Boiteuse figurait déjà le matos d’escalade, je sais maintenant de quel genre de matos j’ai exactement besoin. C’est déjà ça. Il ne me reste plus qu’à trouver les sous…

Ça va là-haut ?
Bon ben voilà, c’était l’histoire de mon ascension le long du mât de la Boiteuse. Comme je vous le disais, ça n’a rien d’exceptionnel, loin s’en faut, mais cela démontre bien que je suis capable de pondre une grosse tartine à partir de pas grand-chose… et que donc parfois, le souci de narration peut susciter l’événement.

Ce qui serait sans doute préjudiciable à l’intégrité de ce blog si un jour je venais à être payé à la ligne ou bien si j’y incorporais des publicités. Mais bon, pour l’instant je le fais pour le plaisir d'écrire, alors il n’y a pas de mal !






Impeccable !




mardi 6 septembre 2011

La vie de ponton

30°25.322N 09°37.025W
Agadir

Je reconnais aisément que je mène une vie de privilégié, et ce quels que soient les critères avec lesquels vous examinez les choses. Que ce soit en Europe ou sur les rives de l’Afrique, ma vie n’est qu’une succession de jolis moments que j’entremaille parfois de galères sans nom, mais l’un dans l’autre on peut dire que l’ensemble est agréable. Vachement agréable

Jugez-en, cette semaine je n’ai pas bougé d’un poil du ponton. C’est-à-dire que j’ai passé mes journées à profiter du temps qui passe, à me distraire en voyant des super-films (Foncez voir Le monde de Barney ou encore les Winners, deux films avec Paul Giamatti. Deux merveilles !), à bricoler sur la Boiteuse à discuter avec mes voisins… Bref, que des choses agréables. J’ai même croisé un rayon de soleil…

En fait, maintenant que j’ai entrepris de vous raconter ce que j’ai fait, je m’aperçois que j’ai du mal à me rappeler quel fut mon emploi du temps… Et comme les pages de mon agenda sont vierges, ça va être coton de se rappeler de tout. D’ailleurs cela est-il vraiment nécessaire ? C’est vrai quoi, je ne suis pas obligé de vous faire un compte rendu circonstancié à chaque fois que je vous écrits. Pas vrai ?

Jean-Pierre & Jean-Pierre
Je me rappelle avoir passé au moins trois jours à tenter de réparer une fuite sur Miss B… Enfin, quand je dis trois jours, c’est pas plus de deux heures par jours, parce que après on n’a plus rien à faire le lendemain. Mais bon, j’ai passé quand même pas mal de temps pour réparer cette fuite sur le boudin bâbord. Une de ces fuites bien compliquée à colmater puisque située sous une couture… J’ai tout essayé. Plusieures rustines y sont passées, différentes colles, et au final, j’ai laissé tomber parce que ça m’a pris la tête. Non mais, on va pas se pourrir le paradis à cause d’une fuite tout de même ! Je n’aurais qu’à remettre un coup de gonfleur à chaque fois que je me servirais de Miss B, et puis c’est tout !

Vendredi, à la boutique de Maroc Télécom j’ai croisé une jeune femme tout à fait charmante, Latifa. Ah Latifa… Intelligente, jolie comme un cœur, cultivée, mais hélas trop prise pour me consacrer du temps lorsque j’ai eut enfin le courage de l’inviter à boire un café… A cette heure elle a dû reprendre son boulot à Casablanca, et je doute de la revoir un jour. Mais bon, j’en garde un très agréable souvenir car cela faisait bien longtemps que mon cœur ne s’était pas emballé de la sorte. Ce qui prouve qu’il est encore capable de battre, et ça c’est plutôt une bonne chose.

Après l'effort... Le réconfort !
Dimanche à été la journée solidarité. Jean-Pierre (celui de droite), un mien voisin, venait enfin de recevoir son nouveau mât (l’ancien ayant coulé corps et âme au fond de l’océan) après presque dix mois d’attente, et il était temps de procéder à sa mise en place. Nous nous y sommes tous attelé pour lui donner un coup de main, ce qui nous a permis de nous retrouvez le soir venu devant un sympathique apéro. J’ai fais mieux connaissance avec les autres voyageurs, et notamment j’ai pas mal discuté avec Louise, Ecossaise ou Galloise je ne sais plus, ce qui m’a permis de pratiquer mon anglais. Mon anglais qui s’améliore déjà pas mal puisque j’ai quasiment tous les soirs de bien belles discussions avec Taka, le premier navigateur japonais qu’il m’ait été donné de rencontrer. La premier Japonais tout court d’ailleurs. Moi qui suis depuis mes jeunes années fasciné par tout ce qui se rapporte au Japon, Taka a donc affaire à un interlocuteur attentif et curieux. Il m’apprend plein de choses et je lui en enseigne d’autres… Et chaque soir je me dis que j’ai bien de la chance d’en apprendre autant.

Philippe Jeantot himself !
Cerise sur le gâteau, ou griotte sur le clafoutis comme vous voulez, j’ai eu la chance de croiser à cet apéro un personnage célèbre, une figure de la voile, le créateur du Vendée-Globe ni plus ni moins, Philippe Jeantot. Hélas, je n’ai pas osé l’aborder et comme celui-ci repartait pour le Panama le lendemain très tôt, je n’ai eu qu’une photo à me mettre sous la dent… Tant pis !

Sinon quoi vous dire ? Ce matin je suis allé faire mes courses pour la semaine. En fait, étant donné que les commerces et le souk sont à perpette les olivettes, il s’agit pour moi d’une véritable expédition. Trois quart-heure de marche à pied en longeant la promenade sur deux kilomètres, puis en bifurquant vers l’intérieur de la ville en passant par la vallée des oiseaux. La vallée des oiseaux est un mini-parc zoologique où sont enfermées quelques exemplaires de la faune locale, ainsi que quelques animaux « exotiques » comme des wallabys. Il y fait plus frais qu’ailleurs et il est bien agréable de la traverser.

La vallée des oiseaux
Une fois qu’on a passé la vallée, on débouche sur l’avenue Hassan II et sur le marché central. Rien à voir avec les mercados que je fréquentais en Espagne. Il y a seulement quelques échoppes et le choix n’est pas ce qui frappe en premier lieux. Mais l’essentiel est là : Un boucher, un poissonnier, un primeur, une boulangerie-pâtisserie… Il y a même un charcutier qui vend du halouf !
Pour le reste, l’épicerie, il faut se rendre à l’Uniprix qui est au coin de la rue. « Uniprix »… Ce vestige du passé est un véritable Bazard, un attrape touriste si vous préférez, mais dans le fond on arrive à trouver quelques boites de conserve, des laitages et de l’alcool. Moi j’y ai acheté ce matin du beurre, de la soupe Harira (hyper-nutritif comme truc !), du lait concentré sucré et des boites de sardines à la sauce piquante. Étant donné l’état de mes finances, je me contente des marques locales bien évidemment, mais si l’on veut, on peut trouver pas mal de nourriture typiquement française. Total de la facture : 80 Dirhams

Nostalgie coloniale ?
Retour au marché central. Là j’y ai acheté deux cuisses de poulets et un demi-kilo de merguez, le tout pour 65 Dirhams.
Les haricots verts frais sont délicieux, et les pêches également, un kilo de chaque pour 20 Dirhams… Sans compter le pain qui est quasiment donnée je m’en suis donc sorti pour 165 Dirhams… et avec à ça je devrais pouvoir tenir toute la semaine.

C’est drôle tout de même… Je m’aperçois que je voulais vous parler de la vie tranquille que je mène sur les pontons d’Agadir, et je me retrouve à vous raconter ma liste de courses… 

Parmi les choses que j’ai faite, j’ai profité que Miss B était de sortie pour y écrire le nom de sa maman, à savoir la Boiteuse. C’est obligatoire, il faut que l’on puisse identifier à quel navire appartient une annexe si jamais on en trouve une qui se ballade toute seule… Et pendant un moment j’ai été tenté de faire comme font certains propriétaires ici, c’est-à-dire d’inscrire le nom du bateau-mère dans les deux langues, en arabe et en français. Finalement je ne l’ai pas fait, mais j’aurais appris que la Boiteuse se dit A Araj, et que lorsqu’on veut l’écrire ça ressemble à ça…

Je ne sais pas pour vous, mais je trouve que sur le papier, l’arabe est une langue magnifiquement esthétique.

A bientôt !

Quelques photos supplémentaires :




jeudi 1 septembre 2011

Un soir à Agadir...

30°25.322N 09°37.025W
Agadir
La journée tire à sa fin sur les quais de la marina d’Agadir. Je suis attablé à la terrasse d’un glacier, le thé à la menthe est sur la table, j’ai allumé mon cigare du jour et je profite du wifi ainsi que du spectacle.
Quel contraste par rapport à ma première semaine passée ici ! Les promeneurs déambulent profitant de la douceur de cette fin d’après-midi. Je les observe.

Le ramadan est terminé (enfin !) et la marina qui était déserte jusqu’à présent, ou seulement fréquentée par les touristes étrangers, semble devenue le point de convergence de la jeunesse d’Agadir. Les commerces sont ouverts, parfois jusqu’à minuit le soir, et tout semble s’être réveillé après un mois de léthargie religieuse.

Ils se promènent par petits groupes. Des groupes de garçons et des groupes de filles… Les garçons sont sur leur « trente-et-un », c’est-à-dire qu’ils ont sorti leurs plus belles chemises et arborent des casquettes à la mode qu’ils portent de travers. Certains se tiennent par l’épaule ou par la main à la mode arabe. Coutume qui ne cesse de m’étonner d’ailleurs… Ils se prennent en photo avec des téléphones portables et font les bogosses dès qu’ils croisent un groupe de filles.

Elles aussi sont sapées comme si elles allaient au bal. Il y a autant de gandouras décorées que de paires de jeans slims méticuleusement délavées. Le hijab n’est pas la règle absolue et à vue de nez je dirais que la moitié au moins de ses demoiselles se promènent tête nue… Cela-dit, lorsque je vais au souk, le hijab est la règle absolue. (Lorsque ce n’est pas carrément la burqa…).

C’est l’absence de mixité qui m’étonne le plus… Ces jeunes se croisent, se regardent, mais ne se parlent pas. Les seules filles qui se font aborder sont celles qui s’habillent le plus à l’européenne. Et j’avoue qu’à la façon parfois très lourde et insistante avec laquelle ces messieurs les draguent, le foulard peut se comprendre… Mais bon, ma mansuétude s’arrête là.

Ici comme ailleurs, dans d’autres ports et dans d’autres pays, les gens aiment à regarder les bateaux. Je ne sais pas ce qu’ils s’imaginent… Peut-être rêvent-ils de voyage, ou bien de la richesse que ces embarcations suggèrent… Richesse toute relative en ce qui concerne les bateaux-voyageurs, je tiens à le préciser.

Entre hier et aujourd’hui j’ai passé quelques heures à nettoyer la coque de la Boiteuse, et j’avais en permanence un public qui semblait bien rigolé à me voir en short et torse nu, à plat-ventre dans mon annexe, en train de frotter comme un forcené !
C’est qu’elle en avait besoin ma chère Boiteuse… Entre les merdes du port de Gran Tarajal qui ont fait comme une espèce de croute au niveau de la ligne de flottaison, et les traces laissées par les défenses, les pontons et les autres bateaux, ma coque était d’une saleté innommable.

C’est comme l’inox d’ailleurs… Après cinq mois de mer, le sel a fait sont œuvre et les chandeliers, le balcon et le portique étaient piqués par la rouille. J’ai usé une gratounette entière pour tout ravoir !

Bref, j’ai commencé à faire une tâche de propre comme on dit, et ensuite il m’a bien fallut continuer et faire tout le bateau. Mais le résultat est là, la Boiteuse est de nouveau belle comme le jour où elle me tapa dans l’œil.

Voilà, c’est fini pour ce soir. La nuit est tombée et la foule continue d’arpenter les quais… Moi je vais me rentrer, j’ai des merguez qui m’attendent.